Entretien avec Alain Sibiri Traoré « J'ai pris de l'importance »

Auteur d'un magnifique but contre Montpellier, Alain Traoré a conscience d'être devenu un cadre à Auxerre comme il l'est déjà en sélection. Et sa plus grande satisfaction est que ça se ressente dans le jeu.   

Alain Traoré aurait bien aimé que son but montre la voie à son équipe contre Montpellier. Malheureusement, aussi belle soit-elle, la frappe de l’international burkinabè de l’AJA n’a fait que sauver l’honneur des Auxerrois dans un match perdu assez lourdement au final (3-1). Pour exprimer sa joie davantage, l’ancien joueur de Brest devra donc encore patienter. Mais ça ne l’a pas empêché lors de l’entretien qu’il nous a accordé en milieu de semaine de revenir sur ce bijou de tir en lucarne. « Je savais que si ça ne rentrait pas, personne n’allait me crier dessus car tout le monde avait vu que personne n’était monté sur moi. » Mais au moment de l’entretien, l’esprit du jeune Auxerrois était déjà au choc face à Marseille dimanche. « Les supporters veulent une victoire. C’est à nous de nous battre pour leur offrir cette victoire », a prévenu le si sympathique joueur de l’AJA avant de raccrocher.
Alain Traoré, Auxerre a changé de président, d’entraîneur, de joueurs et même de vestiaire. Dans ce contexte, votre but face à Montpellier est forcément le bienvenu pour vous personnellement ?Bien sûr. Car le foot est un sport collectif, mais, au final, les individualités ressortent. On est 25 dans le groupe mais seuls onze démarrent les matchs. Donc les exploits personnels comptent forcément. Surtout en début de saison avec un nouveau coach (ndlr : Laurent Fournier). Il faut souvent se distinguer pour avoir une place de titulaire. Pour avoir la confiance du coach, marquer c’est toujours bien. Aujourd’hui, je bénéficie de cette confiance et j’en suis content. Mais ce n’est pas pour ça que je vais baisser les bras. Je vais continuer à bosser.

Avez-vous senti venir cette confiance de Laurent Fournier dès la phase de préparation ?Déjà, à la fin de la saison dernière, j’étais bien. Je me suis dit qu’il fallait que je continue sur cette route-là et que je ne lâche rien. Il y a eu un changement d’entraîneur. Mais, à son arrivée, le coach avait déjà son idée sur moi. Quand je suis revenu de vacances, j’ai continué à bosser, comme je le faisais déjà la saison dernière. Le coach m’a donné ma chance lors des matchs amicaux. J’ai prouvé, donc il était content de moi. C’est là que ça a commencé. Pendant le stage et les matchs amicaux, il fallait conquérir le coach, montrer ses capacités. Durant un mois, le coach a étudié les qualités de chacun et il a fait ses choix. J’en fais partie, donc ça fait plaisir.

Avez-vous l’impression de profiter toujours aujourd’hui de votre élan de la saison dernière ?Oui, car la saison dernière, j’étais un jeune dans l’équipe donc je savais que j’allais être considéré comme tel. En début de saison, le coach (ndlr : Jean Fernandez) ne comptait pas forcément sur moi, mais je n’ai pas baissé les bras pour autant. Et j’ai eu la chance de pouvoir m’appuyer sur le soutien d’Olivier Sorin et d’Adama Coulibaly, qui m’ont beaucoup parlé. Ils m’ont dit que je n’étais plus un jeune, mais que je jouais un rôle important dans l’équipe et que je devais l’assumer et me régaler. Je les ai écoutés et sans me mettre de pression. J’ai réussi à bosser et à suivre les conseils de ces grands frères.

Doit-on comprendre que, comme vous l’êtes en sélection du Burkina-Faso, vous êtes en train de devenir également un cadre à l’AJA ?Avec la sélection, nous sommes avec Charles Kaboré et Jonathan Pitroïpa deux, trois joueurs jeunes mais qui jouent un rôle important dans la sélection. Ce n’est pas facile à gérer car il y a dans le groupe beaucoup de joueurs qui sont plus âgés que nous, mais il faut savoir leur parler avec respect, car c’est ce qui prime. Tu ne peux pas parler aux anciens comme à un gars de ta génération. C’est une responsabilité qui ne me gêne pas, mais que j’essaie d’assumer et de transmettre aux autres jeunes de l’AJA.
« J’ai bien fait de rester »
Ces nouvelles responsabilités vous ont-elles permis de davantage progresser d’une saison à l’autre que lors de votre prêt à Brest, il y a deux ans ?Oui, bien sûr. Le prêt à Brest m’avait fait du bien, mais la responsabilisation dont je bénéficie aujourd’hui dans ma sélection m’a beaucoup aidé. Ça m’a donné davantage de confiance en moi et je suis mieux aujourd’hui, tout simplement. Je suis plus mature et j’arrive bien à analyser les situations aujourd’hui, à faire les bons choix. C’est peut-être le petit détail qui me manquait. Maintenant, j’arrive à prendre les bonnes décisions. Ça a été bénéfique pour moi. Dans le jeu, aujourd’hui, mes coéquipiers me font plus confiance. Ils savent qu’ils peuvent s’appuyer sur moi. Ce qui fait que je prends de l’importance dans le jeu, que je touche beaucoup de ballons. Je prends plus confiance et je suis plus libéré.

Un constat qui donne raison à votre choix de prolonger à Auxerre plutôt que de relever un nouveau challenge ?Oui, bien sûr. J’ai bien fait de rester dans mon club formateur. Je suis encore jeune, j’ai 22 ans donc j’ai le temps. Je suis ravi aujourd’hui d’être toujours dans mon club formateur et de m’y aguerrir. Quitte ensuite pourquoi pas à aller dans un plus grand club et faire une très bonne carrière dans le foot. J’ai connu Manchester United (ndlr : trois semaines lors d’un essai en 2004), ça fait plaisir et rêver aussi. Pour l’instant, je garde la tête sur les épaules. Une nouvelle saison vient de commencer et je vais bien travailler pour, j’espère, faire une très bonne saison. Et on verra à la fin de la saison ce qu’il va se passer.

L’arrivée de Laurent Fournier à la place de Jean Fernandez a-t-elle changé beaucoup de choses pour vous, joueurs ?Forcément. Monsieur Fernandez était un homme à l’âge avancé (ndlr : 57 ans). Alors que Laurent Fournier est un jeune entraîneur qui arrive. C’est seulement son deuxième club en Ligue 1, mais sa philosophie est évidemment plus moderne. Personnellement, ça ne me dérange pas. J’aime bien travailler avec tous les types de coachs. En fait, Monsieur Fernandez ne parlait pas beaucoup devant le groupe. Il prenait les joueurs à part et les plaçait face à leurs responsabilités. Laurent Fournier a lui plutôt un tempérament chaud. Il ne laisse pas passer le moindre détail et parle de tout sur le moment. Dès qu’il voit quelque chose qui ne va pas, il le corrige immédiatement.
Article publié sur Foot365